Dans ce cinquième article et dernier article en lien avec le Sommet International des Coopératives, je vous propose de réfléchir sur une difficulté commune à toutes les organisations. Comment faire pour mesurer la rentabilité de l’immatériel ? En effet, beaucoup de choses sont très difficiles à mesurer.
L’économiste italien, Riccardo Petrella, rappelait lors d’une table ronde le danger principal qui guette les coopératives. À mon avis, il guette toutes les organisations. Il s’agit de la monétisation de toute forme de vie.
En effet, ces dernières années, la tendance est de calculer ce que vaut chaque chose, y compris l’immatériel. Tel que je l’expliquais dans mon précédent article, avec la volonté de croitre, augmenter le chiffre d’affaires et les parts de marché, les organisations doivent prouver la rentabilité de leur projet en € ou en $. L’amélioration des conditions de travail, la satisfaction du client doivent venir avec un nombre pour pouvoir être prises en compte.
Mesurer la non-performance
Et pourtant… chacun sait que l’éducation a un coût important pour la société, mais personne ne remet en cause cet apport peu chiffrable à nos sociétés. En effet, à défaut d’éducation, combien coûterait l’ignorance à un pays ? Si certains pays mesurent la performance du système scolaire aux résultats des élèves, personne ne remet en cause la rentabilité de l’éducation.
Ainsi la pénibilité, le manque d’intérêt ou de responsabilisation au travail entrainent des arrêts maladie, de la désorganisation et une baisse de la productivité. Elles sont en partie mesurables. A contrario, l’amélioration va apporter une meilleure efficacité, une rétention accrue. Ces dernières seront difficilement chiffrables. Cependant, chacun sait mesurer l’importance de façon qualitative.
Quelques entreprises réussissent à mettre en valeur l’immatériel. Prenons par exemple Facebook. Chaque ami·e, groupe, ou encore interaction ont une valeur. Facebook a su les évaluer et les inclure dans son modèle d’affaires.
Des entreprises de loisirs vous vendent une semaine au soleil, avec un remboursement des jours de pluie. C’est ainsi qu’un assureur suisse évalue un jour de pluie pendant vos vacances à 100 francs suisses.
Si pour nous vendre des services ou de l’immatériel, des compagnies sont capables de mettre un prix, pourquoi ne pourrions-nous pas évaluer la valeur de l’immatériel associé à nos projets d’excellence opérationnelle, puisque c’est le seul moyen d’avancer ?
Exemples de mesures de rentabilité immatérielle
Voici des idées pour vous aider à matérialiser les coûts de l’immatériel :
Le bonheur au travail : impacts sur la main-d’œuvre
- Nombre de journées d’absence maladie en moins * salaire moyen *1,3 (pour le temps pris pour traiter l’absence par les autres personnes)
- Productivité à 95% au lieu de 75%
- Journées de formation économisées * coût des formations (meilleure rétention)
- Frais de firme de recrutement supprimés (meilleure rétention et attraction des talents)
La mobilisation des équipes : impacts sur le service à la clientèle
- Nombre de clients qui ne vont pas nous quitter * montant annuel moyen d’achats
- Nombre de clientes qui vont parler de nous à des amies * montant annuel moyen d’achats
- Montant investi en publicité réduit de 20%
- Coût des procès évités par une meilleure résolution des plaintes
À vous de mettre vos propres chiffres en fonction de la réalité de votre organisation et d’imaginer tous les coûts et gains cachés.
Si dans un monde idéal, l’immatériel devrait rester un sanctuaire à l’abri du secteur marchand, soyons créatifs et ajoutons tous les coûts pour mesurer la rentabilité de l’excellence opérationnelle.