L’un des principes clés de la gestion du changement consiste à créer (ou donner) du sens. Toutes s’articulent autour de la vision, du sens donné au changement ou à la transformation organisationnelle. Mais de quel sens parle-t-on ?
Le sens du changement
Le sens est souvent recouvert par le changement et les actions à poser. Quand les équipes sont informées d’un changement, on leur explique ce qui change et l’impact sur le quotidien. Il faut expliquer aux parties prenantes pourquoi le changement intervient. En effet, il est utopique de vouloir convaincre des bénéfices du changement : personne n’aime se faire dire ce qu’il doit penser et ce qui est bon pour lui. De plus, pour un même changement, chacun réagira selon sa sensibilité. Les points forts pour l’une peuvent être des points négatifs pour un autre, il n’est pas possible de convaincre avec un seul argument un groupe entier.
Seules les valeurs de l’entreprise et sa vision sont communes à tous. C’est pourquoi il faut aligner le sens sur ces valeurs. De plus, l’organisation travaillant pour le client, elle aura identifié sa valeur ajoutée pour le client, et n’aura aucun problème à démontrer en quoi le changement vient bonifier la proposition de valeur faite au client. Comme vos équipes ont à cœur votre mission et la valeur que vous apportez à vos clients, elles adopteront d’autant plus rapidement les changements qu’elles comprennent leur intérêt pour ce dernier. Ultimement, comprendre l’impact que j’ai dans mon travail est un facteur de motivation intrinsèque.
Toutefois, il faut prendre garde à ne pas tout justifier au nom du client. Les équipes ne sont pas dupes, elles sont capables de savoir ce qui est bon ou pas pour le client. Un changement qui n’apporte pas de bénéfices doit être mis en doute avant d’être implanté, et doit être expliqué en toute transparence. Dans les organisations réfractaires au changement, on retrouve souvent un manque de confiance entre les équipes opérationnelles et exécutives.
Le processus de deuil et de changement
Plusieurs personnes se sont intéressées au processus du deuil, pour mieux le comprendre, Elizabeth Kubler-Ross a formalisé en 1969 cinq étapes. Plus récemment, Margaret Stroebe et Henk Schut ont déterminé que le processus était plus complexe et était plutôt une alternance entre deux états: se souvenir et regretter le passé, se tourner vers l’avenir. Ces étapes sont vécues par tout être humain confronté à un changement qui met fin à une situation connue. Après avoir pris connaissance du changement (le choc initial), et avant de pouvoir explorer l’inconnu et nous adapter à la nouvelle situation, nous alternons entre un état de tristesse et d’acceptation.
Les réponses et réactions qu’ils expriment vous aideront à mieux identifier les étapes. De je ne veux à je ne peux pas, puis je ne sais pas. Ils vont ensuite essayer et réussir.
Un changement découle souvent d’un projet, qui a sa propre méthodologie. Vous pouvez utiliser différents outils pour mettre en place votre changement, tel que le PDCA. Toutefois, pour structurer votre façon de faire, je vous propose de suivre les huit étapes de la transformation organisationnelle, selon John Kotter. Il est possible d’adapter son modèle à des changements de toute envergure.
- Créer un sentiment d’urgence
- Former une coalition
- Développer une vision et une stratégie
- Communiquer la vision
- Inciter à agir
- Faire des gains rapides
- Consolider les gains et poursuivre les changements
- Ancrer le changement dans la culture d’entreprise
Ces 8 étapes sont elles-mêmes incluses dans 3 grandes étapes, qui ne sont autres que le PDCA :
- Créer les conditions gagnantes (plan — planifier)
- Mobiliser et faciliter les actions (do – réaliser)
- Soutenir le changement (check & act – vérifier et corriger)
Et maintenant, comment mettre en œuvre le changement ?
Je vous donne un exemple, en utilisant les étapes de Kotter, avec un changement peu apprécié: supprimer l’accès à Internet à tous les ordinateurs commandant des équipements industriels.
Créer des conditions gagnantes
Étape 1 : créer le sentiment d’urgence. Nous venons d’arrêter une cyberattaque, mais c’est vraiment de la chance. C’est par hasard qu’une de nos analystes en sécurité (SOC) a pris le temps d’analyser un log sur ce serveur de production. Elle a rapidement escaladé le problème, et après avoir isolé la machine (et perturbé la production pendant une heure), nous avons changé les mots de passe qui semblaient avoir été compromis. C’est juste une question de jours avant qu’une autre attaque de ce type ne se produise. Nous savons que ces serveurs sont vulnérables, mais nous n’avons pas encore trouvé de solution pour les mettre à jour ou les remplacer. L’impact pourrait être un blocage complet de notre système, la perte de nos données ou leur divulgation.
Étapes 2 et 3: former une coalition et définir une vision et une stratégie. Plusieurs membres de l’équipe de direction: informatique, ressources humaines, production, finances et communication se sont rassemblées pour discuter du risque et des solutions potentielles. Ensemble, l’équipe s’est assurée que la solution était alignée avec les valeurs de l’entreprise, et que c’était la meilleure option pour continuer à servir nos clients. Nous approchons d’une période critique et ils ont besoin de nous pour mener à bien leurs opérations.
Mobiliser et faciliter les actions
Étapes 4 et 5: communiquer la vision et inciter à l’action. C’est la responsable de production qui a communiqué le message en direct aux équipes. Les points principaux ont ensuite été repris sur l’intranet, et tous les gestionnaires ont eu accès à des informations complémentaires pour soutenir les besoins de chaque membre du personnel.
Soutenir le changement
Étape 6 et 7: faire des gains rapides, consolider et poursuivre les changements. L’équipe informatique communique depuis de façon plus transparente sur ce qui touche à la sécurité de notre système d’information. Elle a une rubrique à côté de celle de la santé et sécurité. Elle liste les incidents qui auraient pu avoir des conséquences dramatiques, et donne des astuces pour améliorer notre posture de sécurité.
Étape 8: Ancrer le changement dans la culture d’entreprise. Nous avons maintenant une politique de cybersécurité plus claire. Les équipes savent ce qu’elles doivent faire pour protéger notre système d’information. Bien sûr, plusieurs regrettent le temps ou ils pouvaient surfer sur Internet depuis leur poste de contrôle machine. Ils regrettent aussi le temps ou ils ne portaient pas de bouchons d’oreilles et de lunettes de protection. Mais ils comprennent que ces désagréments sont pour le bien de tous.